Plus familier de l’histoire de France que de celle de l’Italie ou même de la Savoie, je ne m’attendais pas à de telles découvertes en m’intéressant à la vie de notre dernier monarque savoyard,
premier roi d’Italie.
En bons Mauriennais, nous savons tous que ce personnage historique est à l’origine de la ligne ferroviaire Culoz-Modane alors appelée chemin de fer Victor Emmanuel. Le roi de Piémont Sardaigne
voulait ainsi relier la France au Piémont en franchissant les Alpes. Un projet ajourné en 1960 lors du rattachement de la Savoie à la France et provisoirement remplacé par le chemin de fer
Fell.
Nous connaissons également le personnage pour sa passion de la chasse en montagne. C’est ainsi qu’il fut un précurseur du parc du Grand Paradis. En 1856, il avait déclaré Réserve royale de chasse
ces montagnes, sauvant ainsi de l’extinction le bouquetin dont la population s’était réduite en ces années-là à des niveaux alarmants.
Bien qu’il ne fût pas un homme de palais, le monarque laissa une trace politique majeure dans l’histoire de la péninsule transalpine. Bien entouré de Massimo d’Azeglio, Cavour, Garibaldi, il mène
à bien l’unité italienne. Pour cela, il reçoit le qualificatif de « Père de la Patrie ». On lui attribuera également celui de « Re galantuomo » : le roi gentilhomme, pour avoir maintenu le statut
Albertin, une constitution avant la lettre, inspirée de celle de la Savoie.
J’aurai l’occasion de revenir sur son œuvre politique ? Je me dois de justifier le titre de cette chronique, vous allez comprendre.
Il épouse en 1 842 l’archiduchesse Marie Adélaïde d’Autriche (1822-1855), dont il eut 8 enfants, à qui il portait une « affection sincère ». Cela explique qu’il eut plusieurs relations
extraconjugales, dont celle avec la « Bella Rosin », Rosa Vercellana, qui sera sa compagne pour la vie et qu’il épousera en 1869, un mariage morganatique. Elle n’avait que 14 ans lorsqu’il en
tomba amoureux, au grand dam de son père, le roi Charles Albert de Sardaigne opposé à cette relation, la majorité sexuelle étant fixée à l’époque, à 16 ans.
Cependant, l’amante, puis la maîtresse du roi, malgré l’amour que lui portait son mari, ont eu à subir son comportement pour le moins volage. L’écrivain Carlo Dossi, dans le journal « Note
azzurre », a déclaré que le roi était virilement « surdoué », qu’il vivait ses passions sexuelles de manière immodérée et que dans ses aventures il avait engendré un nombre très important
d’enfants naturels, justifiant ainsi, d’une autre manière, son qualificatif de « Père de la Patrie » !
Mais ce n’est pas tout ! Un incendie s’étant déclaré dans la pièce du palais où l’enfant en bas âge se trouvait en compagnie de sa nourrice, tous deux auraient péri !
Voici le rapport d’incident : « Le 16 au soir, vers onze heures et demie, la nourrice de Son Altesse Impériale et Royale le prince de Carignano, se trouvant dans son appartement, et voulant tuer
les moustiques avec la lumière, mit le feu dans sa moustiquaire et la robe qu’elle portait encore, voulant sauver l’enfant qui était au lit, les femmes de chambre et autres domestiques
accoururent et éteignirent le feu, car il restait un demi-matelas dans le lit. »
À Florence, il semblait impossible que le petit garçon soit sorti indemne d’un tel accident et les rumeurs ont commencé, notamment parce qu’un boucher, Gaetano Tiburzi, déplorait la disparition
de son fils et, mystérieusement, peu de temps après, il devint inexplicablement riche, allant jusqu’à acheter un immeuble où il a ouvert une nouvelle boucherie.
On ne saura probablement jamais si l’échange de berceaux était une invention de l’époque ou un fait réel, à moins que les descendants actuels de la Maison de Savoie n’acceptent de réaliser un
test ADN, même si l’éventualité semble plutôt lointaine.*
*Sources : Giovana Francesconi, Histoire des rois et des reines.